les feux de camps comme celui-ci, ça te connaît. depuis tout petit, au moins une fois par an tu viens ici. on pourrait penser à une routine ennuyante, mais non. petit, t'étais de ceux qui courent autour du feu, dangereusement, les pieds nus et toutes les étoiles du ciel dans les yeux. maintenant rien n'a changé, tu as toujours des constellations et des diamants dans les pupilles, rendant tout brillant. sauf que maintenant tu regardes les petits courir autour de la valse des flammes.
cette année, t'avais traîné noeh avec toi. il t'avait un peu engueulé parce qu'il dormait, mais tu l'as convaincu qu'il pourrait s'y amuser (parler clopes et alcool l'avait stimulé.) tu lui avais frayé un chemin parmi la foule dense qui entourait le feu. elle semblait l'agacer mais tu voulais pas lui proposer de boire pour le moment. il y a cet ami à qui tu dois le présenter. tu lui as tellement parler de lui. devant cet ami qui a grandi avec toi, tu sautes au cou de ton noeh, euphorique à l'idée de pouvoir le montrer, le faire regarder mais pas trop, puis lui montrer ce feu. c'est pas son élément mais ça lui ressemble un peu. intouchable, comme ses lèvres quand tu tentes d'y déposer un soupçon de baiser.
il te pousse presque et s'enfuit sans un mot, une demi-seconde plus tard. un peu embrassé, tu bafouilles un peu devant ton ami avant d'aller chercher deux grands verres de cette bière à l'odeur bizarre mais fraîche. toi aussi tu disparaît peu à peu dans la foule s'étendant timidement autour du feu. tu marches quelques instants et tu semble reconnaître sa silhouette, le dos vers toi. « noeh? noeh tu fais quoi? » ta voix douce se mélange aux rires et aux chants d'un peu plus loin derrière vous. d'un pas hésitant, tu t'avances encore un peu, ignorant l'expression de son visage et ses yeux. « on a encore rien fait, rien vu, rien bu. tu pars déjà? » bien sûr que non t'as pas compris, t'as l'innocence et l'insouciance d'un enfant.

y'a la fumée qui sort de sa bouche, à intervalle de temps régulier. comme à chaque fois qu'il est énervé. c'est comme dans les dessins animés, quand les méchants deviennent tout rouges et que la fumée sort de leur nez. tu devrais peut-être avoir peur de lui, après tout tu sais de quoi il est capable, ton méchant à toi, mais comme à chaque fois, tu décides plutôt de t'approcher encore de lui, dangereusement et tout de même hésitant. assez prêt pour sentir l'odeur agressive du tabac. tu décides que c'est assez. et tu restes planté là à attendre qu'il réponde, qu'il te regarde, peut-être, te touche de ses yeux océans.
quand c'est pas de la fumée qui s'échappe de sa bouche, c'est des mots. ils reflètent sa colère. ils courent jusqu'à tes oreilles qui s'enfuiraient bien pour pas avoir à les supporter. tu devrais partir en courant, pour ne pas avoir à entendre la suite, la pire suite imaginable, le mensonge. bizarrement, c'est à ce moment, quand ses mots sont durs, tranchants et aiguisés, qu'en toi tu as besoin de t'approcher encore de l'être féroce qu'il est. comme un aimant -plutôt un amant-, tu as besoin de flotter jusqu'à lui, sans aucune grâce mais avec tout l'amour du monde. et y'a rien qui pourra t'en empêcher et te barrer la route, même pas lui, surtout pas lui.
malgré tout, il t'intimide un peu, il t'efface un peu plus dans l'ombre. t'étais mieux là-bas, le feu qui illuminait vos peaux dorées à tout les deux. t'as besoin d'être proche de lui, tu t'es d'ailleurs rapproché, mais pour ce qui est des mots c'est pas si facile. tu bafouilles doucement, presque comme un murmure : « j'voulais juste un baiser. t'énerve pas... » ces paroles devraient s'accompagner d'un geste. peut-être ta main sur son épaule, qui cherche à l'apaiser et le calmer, mais tu sens comme si c'est trop tôt, que y'a encore trop de monde qui n'est pas assez loin de vous deux. tu deviens soudain fasciné par tes espadrilles sur le sol obscur, parce que c'est plus facile que de soutenir son regard alors que tu t'apprêtes à le provoquer, bêtement. « de toute façon... si. j'suis ton amoureux et tu l'sais, mais t'as trop honte de moi pour le montrer. » une moue se dessine sur ton visage, la même moue à chaque fois, celle qui voudrait rester loin de lui tant qu'il ne s'est pas excusé, mais t'es trop faible pour ça. et tu te prendras peut-être un coup ou deux à la place, qui sait.

tu l'aimes. tu l'aimes mais tu ne veux pas l'aimer. c'est mal, c'est moche, c'est contre nature. mais tu l'aimes. ce petit bout d'homme qui incarne la naïveté et la douceur même. ce petit bout d'homme et ses yeux océans. ouais, tu l'aimes et tu l'détestes parce qu'il a trop de pouvoir sur toi. beaucoup trop. sans lui, sans son existence, tu serais parti de cet endroit depuis longtemps. très longtemps. tu détestes cet endroit, les gens t'énervent. ils t'énervent tous. même Lael, lorsqu'il essaye de t'embrasser devant tout le monde. lorsqu'il essaye de braver l'interdit. alors t'es obligé de t'éloigner, et tu fumes une clope pour essayer de te calmer, en essayant de te rassurer. personne ne vous avez vu, n'est-ce pas ? tu l'avais repoussé à temps, personne ne l'avait vu sauter dans tes bras et essayer d'atteindre tes lèvres. l'idée qu'on puisse croire que tu étais avec un homme te rendait complètement dingue. oh, tu pourrais déboîter la mâchoire à ceux qui insinueraient que tu étais gay, sans le moindre doute. et tu pourrais même déboîter la mâchoire de Lael pour le leur prouver.
ce même Lael qui s'approche, qui bafouille, qui murmure, qui provoque. évidemment, qu'il était ton amoureux. tu tuerais quiconque oserait toucher un millimètre de sa peau. Lael était à toi, mais personne n'avait besoin de le savoir. ce n'était pas de lui, dont tu avais honte. c'était de toi. tu avais honte de ton amour pour lui. tu avais honte de cette cicatrice que tu lui avais laissé sur sa joue. tu avais honte de tout ça. de tes sentiments et de tes actes. « tais-toi. » tu grognes en le fusillant du regard, alors que tu écrases ta clope par terre. mais sa tête, encore, toujours, te rends le coeur tout mou. alors tu l'attrapes -fermement- par le bras pour l'attirer plus loin, toujours plus loin de ce fichu feu de camp. assez loin pour que personne ne puisse vous voir. et tu l'embrasses, contre toute attente. pour lui faire plaisir, mais pour toi aussi. parce que tu en avais envie. « je n'aime pas cet endroit. » tu finis par dire, comme si de rien était, ton regard toujours aussi dur et froid.

t'avais encore jamais essayé ça, montrer à tout le monde ton Noeh à toi. montrer qu'il était tien, que tu pouvais en faire ce que tu veux, comme l'embrasser. enfin, ça c'est ce que tu aimerais. pouvoir le montrer comme un trophée, le montrer parce que t'es fier de lui. mais encore une fois, il te prouve que jamais tu ne pourras. il s'est détaché de toi si facilement, si simplement que ça t'as presque vexé. toi jamais tu pourrais faire ça. fuir ton Noeh, ça te paraît insurmontable. pas seulement parce qu'il te rattraperait avant même que tu commences à courir, mais parce que tu veux pas te risquer à le perdre.
il t'aboie de te taire. avant même d'avoir le temps de sursauter il t'attrape brusquement et t'attire plus loin. c'est ce que tu craignais, que son orage se défoule sur toi. mais alors que le feu n'est plus qu'une lointaine source de lumière silencieuse et floue, ses lèvres se mêlent d'une façon surprenante aux tiennes. tu réponds à son baiser un peu plus fort que lui. parce que c'est toujours comme ça, c'est toi qui en donne le plus, c'est toi qui en dit le plus.
il est un peu plus grand que toi, c'est pourquoi tu dois lever la tête un peu, pour le regarder quand il dit qu'il n'aime pas cette endroit. tu glisses un bras en dessous du sien et l'entourer, comme pour l'empêcher de s'enfuir encore de près de toi. tu poses ta tête sur son épaule aussi dur que son regard et tu lui demandes : « alors tu veux aller où? c'est toi qui décide. » parce que toi, ton idée c'était ce feu de camp, et c'est pas un problème d'y renoncer pour rester à ses cotés. tu renoncerais à tout, même à toi, ce que tu fais parfois. « désolé. » tu sais même pas s'il l'entendra, ce pardon. c'est même pas à toi de t'excuser mais t'es comme ça. t'excuser tout le temps, pour tout et pour rien.

c'est instantané, ses lèvres contre les tiennes te calment. ça a un effet apaisant sur toi. il a un effet apaisant sur toi, tout simplement. il a le pouvoir de t'énerver et de te calmer en moins de deux secondes d'intervalles, et ça reste assez perturbant. mais tu as arrêté de chercher à comprendre pourquoi. il faut croire que c'est comme ça, et pas autrement. si tu en avais le courage, tu partirais loin d'ici. loin de cet endroit, et loin de lui. parce que ce qui t'énerve le plus dans tout ça, c'est d'être dépendant de Lael. de l'aimer si fort, et de ne pas pouvoir l'assumer. alors, t'aimerais avoir le courage de pouvoir partir. de pouvoir fuir. mais tu ne peux pas. tout ça à cause de l'effet de ses lèvres contre les tiennes. de sa peau contre la tienne. de son regard naïf et amoureux dans le tien. tu ne peux pas le quitter. tu n'as pas la force. et tu te détestes d'être aussi faible face à lui. face à ce petit bout d'homme qui dicte ta vie sans qu'il ne s'en rende compte.
alors tu l'embrasses plus longtemps, et plus intensément. ça te calme et ça t'énerve en même temps. c'est l'effet lael, tout simplement. il t'entoure de son bras, et cette fois-ci, tu ne le rejettes pas. tout simplement parce que tu sais que personne ne vous voit. si c'était le cas, jamais tu ne le laisserais faire ça, jamais tu le laisserais poser sa tête sur ton épaule. et lorsque tu l'entends s'excuser, c'est plus fort que toi, c'est à ton tour de l'entourer de tes bras musclés. tout simplement parce que tu sais, au fond, tout au fond de toi, que ce n'est pas à lui de s'excuser. pourtant tu le laisses faire, tu le laisses dire, comme si c'était réellement à lui de se faire pardonner. et ça doit sûrement être ton sens de la justice qui te pousse à l'encercler de tes bras pour le serrer contre toi. la chaleur de son corps te réchauffe. « c'est pas grave. » tu dis finalement, même si tu sais pertinemment que ce n'est pas la chose à dire. tu restes cependant énervé, et un rien pourrait te faire exploser. mais c'est moins facile qu'habituellement, tout simplement parce que tu n'as pas une seule goûte d'alcool dans le sang. ta conscience est encore là, et elle t'aide plus ou moins à faire de bons choix. pour l'instant. « je veux que tu me dessines sur la peau. » c'est plus un ordre qu'une demande, en fait. tu as eu du mal à te faire amadouer, au début, mais maintenant tu aimes ça. tu aimes avoir l'oeuvre de l'homme que tu aimes sur toi. tu aimais avoir lael encré en toi.

tu te sens rassuré quand tu sens son bras t'entourer à son tour. rassuré, oui, avec ton blond, c'est chaque jour plus dur de la cerner. tu ne peux prédire ses réactions, et pourtant, tu te montres chaque jour un peu plus imprudent, mais tu vis de ça, d'incertitude, de surprise, de crainte. en plus de te rassurer, son bras aussi dur que la pierre te fait te sentir en sécurité. maintenant que tu marches contre lui, son bras par dessus toi, tu te sens de tout vivre, de tout faire sans rien pour t'arrêter ou t'effrayer à part Noeh lui-même.
alors que tu restes en suspend, ignorant ce qu'il va décider pour vous. sa voix autoritairement sensuel et attirante illumine tout ton être en une fraction de seconde. en demandant ce qu'il vient de te demander, il t'as rempli les yeux de toutes les étoiles du ciel pour finalement les faire briller dans les siens, il a laisse ta bouche s'ouvrir en un sourire à la fois incrédule et vivant, comme s'il t'avait autorisé à respirer à nouveau, à faire ce que tu voulais. en l’occurrence dessiner, t'as toujours envie, mais sur lui tu le fais rarement. pourtant tu voudrais le faire chaque soir. marqué sa peau de tes envies, tes idées, tes mains. c'est comme si tu marquais ton territoire, si tu interdisais quiconque de toucher à sa peau en la signant.
il n'y a que très peu d'espace entre vous mais tu tentes quand même de s'approcher encore. il t'as ravi de la façon la plus simple qui soit, et ce au point d'oublier ce feu de camp qui n'avait finalement pas une si grande importance pour toi. tu commences à marcher en direction de ta cabane. « c'est la meilleure chose que tu pouvais m'demander Noeh! » tu souris encore bêtement sans t'en rendre compte. en marchant toujours collé à lui, tu fronces les sourcils, ce que tu fais tout le temps en réfléchissant. « tu sais ce que tu veux? parce que moi je sais déjà ce que je veux te faire. quelque chose que personne d'autre que toi et moi ne comprendront. » tu ne t'arrêtes plus de parler, toujours avec la même voix qui se brise et s'éteint à chaque phrase. s'il n'est pas très bavard, Noeh devrait savoir que toi si, encore plus quand tu es à l'aise.
tu sais que tout ça, ce calme entre vous ne tient qu'à un fil. tu sais qu'un rien peut le couper et faire exploser la bombe que cache Noeh derrière ses yeux houleux.

il est tout joyeux face à ta demande - ton ordre, plutôt. son visage s'illumine, il est heureux comme un gamin le matin de noël. et c'est bizarre, mais le voir heureux, ça te rend heureux. et ça te perturbe, aussi. parce que vous ressemblez à un vrai couple, là, à marcher l'un à côté de l'autre en direction de sa cabane. et ça, ce n'est pas ce que t'apprécie le plus. mais t'essaie d'en faire abstraction, tu te contentes de regarder autour de toi toutes les deux ou trois minutes pour t'assurer que personne ne vous voit comme ça, l'un contre l'autre. c'est la seule chose qui t'importe, que personne ne le sache. que personne ne vous voit.
il parle encore, toujours, il ne s'arrête jamais. il parle pour deux, parce que tu es loin d'être aussi bavard que lui. alors tu te contentes de l'écouter, un petit sourire en coin se dessinant sur tes lèvres alors que tu vois qu'il est excité comme une puce à l'idée de te tatouer. « fais ce que tu veux. » tu finis par dire alors que vous arrivez finalement à la cabane sans que l'orage n'est éclaté. lael ne doit sûrement pas se rendre compte que tu te retiens, que tu prends sur toi, pour lui. parce que ta conscience domine ta colère inexpliquée et inexplicable. alors oui, au lieu d'avoir décoré son visage de ton poing comme tu le faisais bien trop souvent, tu voulais qu'il te dessine sur la peau.

vous arrivez dans ton petit chez toi, ta cabane bleu au bord du lac, et à peine le seuil de la porte franchi, tu te précipites au quatre coins de l'abri en bois pour allumer les divers bougies que tu as trouvé au marché de la communauté et illuminer finalement la pièce. eh oui, pas d’électricité ici. noeh n'a pratiquement pas parlé du trajet, rien d'anormal là-dedans, le plus étonnant c'est qu'il t'ait laissé parler, qu'il t'ait laissé t'accrocher à lui comme un enfant à sa maman. ça lui ressemble pas, et t'as comme l'impression que ce cadre idyllique sera bientôt sera bientôt brisé par la rage qui coule dans ses veines.
tu l'invites à s'asseoir sur le vieux sofa qui traîne là, sans un mot, juste un regard. puisque qu'il apprécie le silence, alors tu tentes de l'imiter. mais ses lèvres contre les tiennes ou la possibilité de parler, faut avouer que tu sais pas trop quoi en faire. tu sors ta boîte fétiche, celle qui renferme aiguille et encre naturel puis tu la poses près de lui, avant de t'asseoir à califourchon sur lui, son visage plus bat que le tien, sur lequel se dessine un regard hautain, un sourire en coin, juste pour le taquiner. tu attrapes son bras gauche et le presse, l'observe, te penche dessus, recule, cherchant l'emplacement parfait.
mais c'en est trop, le silence, il faut que tu dises quelque chose. rien qu'un mot. ou deux. mais c'est devenu trop pressant, l'air trop oppressant. tu sens d'avance que tu vas tout gâcher, mais tu supportes pas l'idée de vivre dans un mot sans parole, communiquer avec les yeux, c'est sur après tout. puis ceux de ton Noeh sont aussi fermés que ses lèvres. alors tu vas dire la première chose qui te passe par la tête. et tu sais aussi d'avance que tu t'arrêtera pas. « tu aimes bien les lions? » ça a l'aire insensé comme question, mais il y a bien une raison. tu poses son bras et te concentre sur son visage, cherchant à cerner la moindre expressions.  « j'en ai jamais vu... mais j'trouve que tu ressemble un peu à un lion. » capté par son regard, comme hypnotisé tu commences à déboutonné sa chemise, pas pour ce que tu voudrais pourtant faire, mais pour avoir tout son bras dégagé. tu en profites néanmoins pour poser un doigt sur son torse, et glisser le long de sa peau qui recouvre ses muscles sculptés comme ceux d'une statue d'un dieu grec. « fier. majestueux. puissant. blond. t'as tout d'un lion en fait. » ces mots glissent hors de ta bouche et tes mains pleines de questions continue de parcourir son torse. tu ne sais pas vraiment s'il voit où tu veux en venir, mais pour toi c'est très clair. il est ton lion, courageux et dangereux, et tu veux le dessiner.

tes mains dessinent déjà sur son corps. sûrement des motifs sans sens, sans vie. tu te contentes de suivre les lignes de son corps. les abdominaux, les pectoraux, rien n'échappe à tes doigts fragiles. et ce simple contact, qui semble le faire frissonner, et qui te fait fondre, toi, te fais sentir comme s'il n'y avait rien d'autre dans l'univers. que sa peau, tes mains pour la toucher, mais plus aucunes montagnes, aucuns nuages, aucuns océans, rien de plus grand que ce frisson, rien qui puisse se mettre au travers de vos yeux. les siens sont comme de un livre. de la poésie, peut-être, avec des mots beaux mais trop compliqués pour que tu puisses les comprendre. en somme des yeux beaux, que l'on regarde sans pouvoir les déchiffrer.
tu voulais seulement te préparer à jeter l'encre sur la peau, mais voilà que tu as réveille le fauve qui sommeillait en lui. celui que tu décrivais trois secondes plus tôt, fais son apparition, plante une main dans ta cuisse et l'autre dans ta nuque pour t'arriver un peu plus vers lui. vos deux corps magnétiques ne sont jamais assez proches. les tiennes, de mains, tiennent son torse, toujours ce besoin de l'empêcher de fuir. alors que vos lèvres se rencontrent de nouveaux, que vos langues se cherchent et enfin valsent. plus rien ne peut vous arracher l'un de l'autre, il est trop tard pour faire machine arrière. tu es sa proie, ses griffes sont plantés dans ta peau, et pour aucunes lumières au monde tu voudrais remplacer cette emprise.
mais finalement, des mots prennent forme et glissent des lèvres de noeh. ils te font sourire. ils n'avaient rien d'amusants, ils sont juste le miroir des pensées de noeh, et c'est assez pour t'enchanter. tu l'embrasses une dernière fois, du bout des lèvres avant de te redresser et te découvrir soudain une fascination pour ses cheveux, sa crinière. « j'ai pas besoin d'avoir fait un safari pour les avoir vu dans mes livres. » que tu dis, le sourire en coin qui se moque, encore et toujours, ainsi qu'une mains dans ses cheveux couleur or. elle passe et repasse dans les boucles, inlassablement, infatigable. « ça te plait pas que je te compare à une bête féroce? je pensais que ça t'amuserait. » t'aimes ces moments. ceux où t'es libre de faire ce que tu veux de lui. ceux où tu l'apprivoises, au son de ta voix, au rythme des touchers.

peut-être que tu as une certaine ressemblance avec un félin, après tout, vu la manière dont tu te jettes sur lui. t'es incapable de te contrôler. surtout quand il est là, assis sur toi, à jouer avec tes nerfs. t'as besoin de sentir ses lèvres contre les tiennes, de mêler vos souffles et vos langues, de l'accrocher de tes mains comme une proie que tu ne laisserais pas partir. jamais. parce que lael était à toi. et tu avais besoin de t'en assurer. il t'avait rendu accro, il t'avait rendu dépendant, et il en subissait logiquement les conséquences. tu pourrais très probablement passer ta vie à l'embrasser là, à le sentir contre toi, alors que ton coeur bat indéniablement plus vite.
mais tu finis par lâcher ses lèvres, un peu à contre coeur, alors que ton regard bleu se rouvre pour plonger dans le sien. tu en oublies où vous êtes, et pourquoi vous êtes là. ce que tu sais, c'est que vous êtes à l'abri des regards et c'est tout ce qui t'importe. que personne ne puisse vous voir dans cette position, que personne ne puisse vous voir vous dévorer ainsi du regard. il te parle de ses lèvres et ça te fait sourire, un peu. il est pas croyable. il y a une chose qui te fascine chez lael, c'est sa manière d'être coupé du monde, de se contenter de là où il est et de ne pas chercher à vouloir plus, et de se contenter de ses fameux livres. et bizarrement, ses mains dans tes cheveux te font un bien fou. un peu comme à un chat à qui on caresserait la tête. tu pourrais très probablement ronronner et t'endormir, là, maintenant. « je ne suis pas une bête féroce. » tu grommelles alors que tu le rapproches de toi à l'aide de tes mains, incapable de le garder trop loin de toi. au fond, tu savais que tu avais tout d'une bête féroce. la colère, la haine, la violence. mais tu ne voulais pas l'être, et tu ne voulais pas que lael te voit comme ça. pourtant, c'était le cas, et tu ne pouvais rien y faire. rien du tout. « vas-y. » tu finis par lui dire sans le lâcher du regard, alors que tu lui offres tes bras, et même ton corps tout entier. qu'il encre en toi l'image qu'il avait de ta mauvaise personne.

il n'y que dans ce genre de moment que noeh peut te rendre tout ce que tu as à lui offrir. quand vous êtes tout deux enfermés, l'un contre l'autre, aucun œil inconnu pour vous surprendre. il n'y a que là qu'il lâche prise, pas sur toi non, mais ce qu'il cache à tous. la passion, peut-être même l'amour, qui le pousse à te garder pour lui seul, ton cœur contre le sien, qui le pousse à ne plus te lâcher, seulement goûter à tes lèvres. ça te dérange pas. de te cacher, pour pouvoir partager le feu au fond de toi avec le sien, brûlant, ardent, à la fois sauvage mais tendre. même si toi, tu verrais rien de mal à faire ça devant les autres. te tenir ainsi sur lui sous les regards indiscrets mais tolérants du camp. t'y verrais rien de mal. quel est le problème à prouver à son amoureux qu'il est tien et que tu es sien? c'est pourtant si simple. n'importe qui comprendrait. mais pas noeh, visiblement. tu continues à croire qu'il a peur qu'il a peur des gens, dehors. peut-être l'ont-il déjà blessé. tu ne peux pas vraiment lui demander, tu sais comment il est, impulsif, il penserait que tu le vois faible et que tu doutes de sa virilité, ou qu'importe, seulement que tu mets en doute l'image si stable qu'il voudrait être.
encore une fois, tu te sens glisser sur ses cuisses mon te retrouver collé à lui, la chaleur de son torse traverse ton tee-shirt et te réchauffe même. tu caches ton visage dans son cou. tu pourrais y rester une éternité, rester là à respirer contre sa peau, lové contre lui, dos à tout le reste du monde qui jamais ne pourra t'intéresser plus que ton marin. tu lui dis finalement, les lèvres presque collées à sa peau ; « t'inquiètes pas, t'es pas une bête féroce, j'ai pas peur de toi, t'es tout mignon comme un chaton. » peut-être que tu vas l'agacer à faire une remarque aussi rose de guimauve que celle-là, mais c'est un peu le but. après celui de le rassurer.
quand tu te redresses, il est là, ses bras ouverts et tendus à toi mais cette fois pas pour t'enlacer. mais pour être recouvert de tes idées. il se doute que ça va faire mal, mais peut-être a-t-il pris goût à cette douleur. en tout cas, tu vas essayer de le faire saigner le moins possible, même si ça ne sera pas la première fois que le sang de l'un coule sur la peau de l'autre. d'un crayon noir prévu à cet effet, tu dessines d'abord sur son bras gauche, grossièrement le félin. son visage est dur et brut, mais encadré par une crinière comme dans le vent, plus libre et moins institutionnel que le reste. le dessin a la taille de la paume de ta main. une fois l'esquisse terminé, tu prends un peu de recul et maintenant une aiguille dans la main, te voilà hésitant et incertain. regard inquiet, planté dans le sien, tu dis presque gravement, un peu peureux de ce qu'il en pensera. « j'veux pas que ce soit trop douloureux. et j'veux qu'ça te plaise aussi. regarde. mais il y aura des ombres, aussi. » tu doutes que cela l'intéresse vraiment, les ombres, le contraste, la précision du dessin et l'art en général, mais t'as besoin de te persuader que c'est ce qu'il veut, comme à chaque fois, pourtant t'aimes ça. encrer ton art sur ses muscles. bien que tu sois persuadé que tes brouillons jamais ne seront assez bien pour être gravé de la sorte sur son être.

il est contre toi, sa tête dans ton cou, et sentir son souffle contre ta peau te fait du bien. un peu trop, même. bizarrement, tu aimes ce moment, tu aimes cet instant avec lui. il n'y a rien d'exceptionnel, mais c'est justement ça qui est exceptionnel, en quelque sorte. tu n'es plus vraiment en colère, parce qu'il t'a calmé. tu n'as plus peur qu'on puisse vous voir. tu es apaisé, et c'est rare. très rare. et c'est grace à Lael et ses sortes de pouvoir magiques qu'il a sûr toi. c'est inexplicable. tout ça est inexplicable. votre relation. tout ça.
évidemment, ça ne te plaît pas lorsqu'il te compare à un chaton. tu grognes même un peu, tu râles, pour lui prouver le contraire. tu n'es pas un chaton tout mignon. mais d'un côté, ça te rassure un peu, un tout petit peu, qu'il te dise quelque chose comme ça. il n'a pas peur de toi. et c'est bon signe. ou peut-être pas. ça serait peut-être plus simple s'il avait peur de toi. qu'importe.
sans rien dire, tu l'observes faire, tu l'observes dessiner, sortir l'aiguille. il s'inquiète pour la douleur. mais toi la douleur, ça ne te fait pas peur. ça ne t'a jamais fait peur. de la douleur, tu en éprouves tout le temps. constamment. la douleur fait partie de toi. et puis, tu te fiches aussi de ce fichu lion, tu t'en fous, vraiment, tu veux juste que ce soit lui qui le fasse. tu attrapes son menton à l'aide de ta main droite, histoire qu'il te regarde. « arrête de faire ta chochotte, Lael. » tu dis avec autorité alors que ton regard bleu ne quitte pas le sien. « fais-le. » tu ordonnes finalement, en profitant pour lui voler un autre baiser l'air de rien. n'importe quoi.

déjà tout petit, t'emmenais tes copains dans ta cabane pour leur dessiner des petites formes. là où ils pouvaient le cacher de leur parent. parce que si toi ça te plaisait, c'était pas du goût de tout le monde. surtout que tes méthodes étaient déjà pas des plus saines. tout petit déjà, tu faisais ça, mais jamais personne ne te faisait confiance comme noeh. le dessin, c'est pas que des couleurs et des formes, quand c'est sur les frissons c'est une question de confiance et de complicité. noeh est pas seulement une galerie de tes dessins, c'est un corps marqué par ton amour. jamais personne tu n'avais aimé tatoué quelqu'un que lui, car ça a toujours été plus que des dessins. mais des promesses. celle d'une réserve de l'un à l'autre, peut-être une promesse qui durera le temps que la peau sera chaude, dorée et douce la nuit.
t'as déjà fait beaucoup plus gros sur lui, comme cette véritable fresque sur son torse, mais cette fois ça ressemblait plus à un besoin qu'une envie. un besoin de lier encore quelques millimètres de sa peau à ton esprit. un besoin de sentir l'aiguille décider d'une nouvelle promesse. un besoin de te garder éternellement sur lui. s'il ne veut pas le montrer aux autres, alors il devra au moins le voir chaque jour de plus sur son propre corps. condamnation ou bénédiction?
de sa main usé par le travail il t'attrape le visage, de façon à n'avoir que ses yeux dans son champ de vision. comme si tu pouvais trouver un intérêt quelconque sur autre chose que ses yeux, dans cette pièce. il t'ordonne de le faire. comme si cela ne pouvait attendre une seconde de plus. tu souris contre ses lèvres en signe d'accord et tu te concentre enfin sur la partie de son bras qui t'intéresse. tu la palpes doucement sans même t'en rendre compte, pour te rendre compte de la profondeur nécessaire pour que l'encre se mêle au sang et ne disparaisse pas à la cicatrisation.
il n'y a que son souffle et le tien, plus rien pour t'arrêter. l'aiguille transperce la profondeur nécessaire de peau et commence à tracer le contour de l'esquisse en noir sur sa peau qui, illuminée par les bougies, prend les teintes du soleil. les premières gouttes de sang perle sur sa peau mais aucun de vous ne semble y prêter attention. tu es concentré, tu repasses sur la ligne de feu que tu viens dessiner avec la même aiguille, mais cette fois recouverte d'une encre noire corbeau.
encore une fois, c'est plus fort que toi, il faut que tu brises le silence. tout est moins rassurant sans entendre la voix de quelqu'un. donc tu te contentes de penser à voix haute, sans le regarder pour autant, tu ne voudrais pas graver un dessin imprécis sur son bras sculpté comme à la pierre. « en fait c'est pas si dur. » quelques secondes. une goutte de sang ou deux en plus. cette pause n'était pas volontaire, tu t'expliques maladroitement car tu sens déjà un de ses sourcils s'arquer, poussé par l'incompréhension. « je veux dire... tu pourrais le faire aussi. sur moi. » il ne dessine pas, bien évidemment, la patience c'est pas son fort. mais tu lui apprendras. toi aussi tu veux un bout de lui gravé sur toi à tout jamais.
à mesure que l'animal prend forme, tu essuies le sang avec un bout de tissu bientôt complètement rouge et noir. tes mains aussi sont recouvertes de ces deux couleurs, mais tu es bien trop concentré sur sa peau mais aussi les vibrations de sa voix, sa réaction. t'es comme un gosse qui attend l'autorisation de ses parents.

tu le laisses faire, tu le laisses planter son aiguille dans ta peau. tout simplement parce que tu lui fais confiance. la douleur te fait serrer le poing et les dents, mais tu ne dis rien. tu ne grimaces pas non plus. tu te contentes de le regarder faire avec attention, prêt à lui aboyer dessus s'il fait quelque chose de travers sur ta peau. mais ce n'est pas le cas. évidemment que non, il fait attention. tu regardes ses mains, l'encre, le sang. sans broncher. tu te contentes d'observer dans le silence, c'est là où tu es le plus doué.
et puis Lael brise le silence. comme d'habitude. c'est toujours lui qui parle le premier, tout simplement parce qu'il ne supporte pas les silences. tu le connais depuis le temps. pourtant tu ne fais pas d'efforts pour parler plus. il y avait des choses que tu ne pouvais tout simplement pas changer. à ses paroles, tu ne peux pas t'empêcher de rire. un rire moqueur. est-ce qu'il croyait vraiment que tu allais le tatouer ? peut-être qu'il croyait ça parce que tu lui faisais souvent du mal, mais tu n'avais pas la patience pour faire ce genre de chose. tu ne savais même pas si l'aiguille pourrait tenir entre tes gros doigts rugueux. « arrête de dire des conneries, Lael. » tu réponds tout simplement en tant que réponse. jamais tu ne ferais ça, tu ne pouvais pas, et il le savait très bien. « ça va pas la tête ? » tu en rajoutes une couche, histoire qu'il comprenne que c'est mort de chez mort.
mais qu'importe. tu le regardes faire et il faut le dire, tu es satisfait de ce qui se forme sous tes yeux. « j'aime bien. » tu lui fais remarquer, parce que tu sais qu'il a besoin de l'entendre.

au lieu de soupirer, tu décides d'ignorer son refus de te marquer de sa main, lui aussi. tu te rassures comme tu peux, en te disant que ce n'est pas qu'il n'a pas envie de griffonner, seulement qu'il ne peut pas. ses mains sont trop bestiales pour ta peau cassable comme une feuille à l'automne. puis, après tout, il t'a déchiré. plus que son odeur, tu portes le sceau de son courroux sur ton visage. parfois, quand tu te vois dans le miroir, tu te dis que cette brèche sur ta joue n'est que sa signature sur ta peau pâle, plume et blafarde. comme toi tu encres ton ombre sur sa peau ferme, d'or et tamisée. alors parfois, tu le provoques un peu, l'autre lui, irritable et instable. ses excès de violence te font sentir comme si tu étais sa seule obsession. c'est tout ce qui t'importe.
le carnassier prend forme sur son pectoraux et tu ne sais encore si tu es satisfait. seul lui le décidera. tes yeux ne reflètent les traits de cet animal depuis de longues minutes déjà. il ne bronche pas, impassible, aucune goutte de sang ne fait osciller noeh, à l'image du fauve sur son bras. tu finis en essuyant toutes ces couleurs inquiétantes sur vos deux peaux. et encore une fois te voilà à observer son bras sous tout les angles, cherchant le moindre défauts, la moindre faille. mais il te rassure rapidement, et tu souris. « j'espère bien. il (je) est là pour tout le temps. » tu dis en plongeant ton regard dans le sien. dedans, t'y as vu un océan d'eau douce. peut-être pas pour longtemps, mais chaque regard est une vague de plus t'emportant un peu plus bas, près de lui, loin de la surface, de tout. puis ça t'es venu comme ça, parce que tu sais qu'il vient de là où les bateaux partent des mois, briser les vagues et le vent. t'as pensé à voix haute, en passant doucement ton pouce sur le lion de son bras, délicatement, pour ne pas effacer l'encre ou ouvrir les traits du dessin, pas tout à faits cicatrisés. « tu m'emmèneras d'où tu viens? là-bas, la mer. je l'ai jamais vu alors que t'as passé toute ta vie à la traverser. » les nouveaux horizons, le lointain, c'est pas ce qui t'attire le plus. mais tu veux pénétrer un peu plus noeh. tu veux connaître son élément, et tant pis si tu dois tout y laisser derrière toi. tant pis si tu dois sombrer sous les rouleaux dans ses bras.