les hautes lumières, c'est quoi pour toi ? tout. le début, la fin, la vie. mon foyer, mon chez-moi, ma famille. ce que j'ai toujours connu, ce que je connaîtrai toujours. c'est un havre de paix, un paradis sur terre, une utopie. pour moi, c'est simplement beau. une merveille de la nature, un endroit tranquille. pour moi, c'est voir ma sœur dessiner, le visage rayonnant. c'est voir les autres tels qu'ils sont vraiment, sans faux-semblants, les voir commencer une nouvelle vie, loin du monde, loin de tout. pour moi, les hautes lumières, c'est le bonheur.

le goudron, les voitures, la technologie, toutes ces choses là, ça ne te tente pas des fois, ou t'es plutôt grand air ? ça m'a tenté, j'ai essayé. je suis parti, je tournais en rond. l'impression de n'être voué à rien, de n'avoir aucun but, pas de finalité, ça m'a poussé à m'en aller. mais je suis revenu. les paysages déformés par l'homme, le bruit, les désirs dépourvus de sens : l'horreur. le grand air, la liberté, la nature, sa douceur, ce bien-être, c'est ça la vraie vie, ce dont j'ai besoin.

et tu comptes rester encore longtemps ici, ou c'est juste pour une petite durée ? qui sait ce que la vie nous réserve ? je resterais aussi longtemps que j'en aurais l'occasion. j'ai tout ici. ma famille, mes amis, mon avenir. je ne me vois pas aller ailleurs, c'est ici que se trouve ma place, j'ai un rôle à jouer, un but, une raison de vivre. je resterais jusqu'à mon dernier souffle, ma dernière heure, aussi longtemps que je le peux. ici, c'est là où je dois être.

tu fais quoi de tes petites mains sinon ? construire, bâtir, aider. peu importe comment vous appelez ça. je suis charpentier. travailler de mes mains, c'est agréable, ça me permet de me dépenser, de me rendre compte de ce que je fais. mais le besoin d'être utile, savoir que l'on sert à quelque chose, c'était une nécessité. alors c'est venu comme une évidence. être charpentier ici, c'est la sensation de rendre servir à la personne qui prime. en faisant ce métier là, j'aide les autres à avoir un toit, un chez-eux, un lieu qui leur est propre. je les aide à se sentir bien. c'est le principal.


tu te lèves, il est à peine sept heures. t'as toujours été le genre à être debout avant les autres, pour profiter de l'air frais, du calme, du silence, de la brise matinale, du paysage. ces petits instants d'éternités où se mêlent tranquillité et solitude. peut-être que c'est une habitude que tu tiens de tes premiers jours sur cette terre, du moment où tu as ouvert les yeux. naître aux aurores a peut-être influencé ton existence, qui sait ? depuis tout gamin t'as toujours été un lève-tôt. mais on n'est pas là pour parler de ton enfance, pas vrai ? qu'est-ce qu'on pourrait dire de toute façon ? Martin, gamin turbulent, toujours à courir partout, assez bruyant. comme quoi, t'as bien changé. c'est l'arrivée de ta petite sœur qui t'a calmé ou quoi ? t'avais quoi, six ans quand elle a débarqué ? depuis, t'es le super grand frère. tu la protèges, peut-être même un peu trop. t'as pas l'impression de lui gâcher la vie à la surveiller tout le temps ? mais bon, tu l'aimes ta sœur, t'y peux rien. donc je disais que tu avais changé, c'est vrai. maintenant, t'es un type calme, t'évites les ennuis, t'es bien dans ton coin, un peu tout seul. tu parles pas beaucoup, hein. t'es le genre de personne qui écoute et étudie, qui observe et retient. tu réfléchis avant de parler, ça t'évite de dire n'importe quoi. t'aimes la vie, la nature, ta liberté. oh ça, tu y tiens énormément. t'es assez intelligent, pas plus que la moyenne mais quand même. par contre, qu'est-ce que t'es impulsif et colérique. tu t'énerves facilement, un peu trop même, et c'est ton problème. t'aimes pas te battre mais c'est plus fort que toi. je sais que lorsque ça t'arrive, tu t'isoles ensuite. tu vas lire, ah ça t'aimes lire, ou tu réfléchis, tu restes au calme, dans le silence. et nous y revoilà. t'aimes être utile, c'est pour ça que t'es devenu charpentier, pas vrai ? il t'en aura fallu du temps pour trouver ta voie. te barrer à vingt ans, c'était pas ta meilleure idée mais pas la pire non plus, il faut l'avouer. quitter ton havre de paix pour la ville sous prétexte que c'est mieux ailleurs, que tu ne sers à rien, qu'il te faut trouver un but qui te pousse à vivre, ça va un moment. et puis t'es revenu. t'as tenu six mois. tu tiens trop à tes habitudes, ton calme et ta sœur pour partir comme ça. t'as juste chopé une mauvaise habitude en partant. la clope, c'est beau, c'est bon, pas vrai ? faudrait penser à arrêter maintenant, t'as pas de raison de continuer. au moins t'essayes. qu'est-ce que tu veux que je dise de plus sur toi ? t'attends quoi de la vie ? me réponds pas du bonheur, c'est une truc de fillette ça. j'y crois, t'y tiens tant que ça à ton bonheur ? et bien bonne chance. fonde la ta famille, rends toi utile, fais ce que tu aimes et sois heureux. mais par dessus tout : vis.