eh, toi, qu'est-ce que tu viens faire par ici ? Et toi, qu'est-ce que tu fais là ? Tu t'es perdu toi aussi. Ouai, je sais. Enfin, non, je sais pas, je sais plus. Je me suis perdue. Je me suis retrouvée (là). Je voulais fuir le monde, les gens, les regards, les messes basses. Lui. Je voulais voir ce que ça faisait de tout recommencer, d'être plus personne. D'être celle que je voulais toujours être sans oser tout changer. Oh, arrête de me regarder comme ça. Tu crois que je suis la seule à être perdue, à plus être là-bas, à avoir fuit face à tant de houle ? C'était trop pour moi, j'avais besoin de nature, de vous, peut-être.
d'où tu nous viens, tu faisais quoi avant ? parle nous un peu de ta vie avant. Avant, je passais le temps. Je passais là, je repassais. Je errais sans raison. Je vivais ma vie comme on me l'avait apprise. Métro. Boulot. Dodo. Enfin, c'était pas vraiment ça. C'était plutôt Dodo. Fac ? Ouai, non. Dodo. Un petit verre un ville ? Ouai, pourquoi pas. Attends, j'suis où là, t'es qui toi ? Merde, qu'est-ce que j'ai fait hier. Putain, mais je sais plus. Ah, tiens, salut. Salut encore. Encore salut. Bonjour. T'as bien dormi mon coeur ? Allez, salut ! Putain mais t'es où ? Pars pas, reviens. Merde. Bon. Je vais où ? 
et tu comptes rester encore longtemps ici, ou c'est juste pour une petite durée ? Je resterais aussi longtemps qu'il le faudra. Deux jours, trois semaine, un an, toute la vie. Je sais pas. J'y réfléchis pas trop. Pour l'instant, je reste là, on verra. On verra si je guéris.
tu fais quoi de tes petites mains sinon ? J'écris des poèmes dans la poussière du camp, je fais des couronnes de fleurs pour les enfants. Je regarde la pluie tomber, le soleil se lever. Je ère, je vais vite. Pour l'instant, j'aide un peu partout. Mais j'aime bien faire des colliers de fleurs. En fait, j'aime bien les fleurs. C'est jolie une fleur. C'est beau, c'est doux. C'est un peu partout mais ça émerveille toujours. Je voudrais être une fleur.


Tu sais, j'ai jamais rien voulu de tout ça moi. Je voulais grandir, vite, trop vite. Je voulais voir le monde, faire les cents pas. Adopter un chien puis vieillir avec toi. Mais est-ce qu'on a vraiment le choix ? Est-ce que j'ai le choix, moi ? Si ça se trouve, je peux encore tout changer. Je peux changer, moi. Je peux devenir celle que t'attendais, je peux être celle dont tu rêves. Mais si, regarde ! Je suis belle, intelligente, puis je me tais quand tu parle. C'est pas ça que tu voulais ? Une photo dans un magazine, une belle plante qui s'exprime que pour te dire à quel point elle t'appartient. Puis une fois que tu l'as, tu la lâche pour une autre. Plus belle, plus muette. Regarde, regarde. Regarde comme tu me manques, comme je t'aime encore. Allez, s'il te plait, regarde moi. Je suis là. Allez...


Tu vois pas que j'ai le coeur qui bat ? Tu le sens pas, toi, se serrer quand je te vois avec elle ? Et puis, c'est qui elle d'abord. Je croyais que j'étais à toi, je croyais que je finissais tes phrases, que t'allais m'apprendre à nager, que tu m'emmènerais sur ton île. Tu sais, j'ai jamais rien voulu de tout ça moi. Je voulais grandir, vite, trop vite. Faire comme les autres, les adultes. Je voulais m'endormir dans tes bras et me réveiller à cause de toi. Je voulais répondre à tes sourires et puis serrer ta main. Mais toi, tu me réponds pas. Tu me réponds plus. T'es parti et tu crois que t'en as le droit. Tu crois que c'est bon, je t'ai oublié. Que de toute façon, on se connaissait pas assez. Mais moi je te connais. Je sais que t'as une cicatrice là, que quand tu souris tes fossettes ressortent. Je sais que tes yeux s'illuminent quand tu me parles de ton île. Je sais que tu tangues entre deux langues. Que t'as une petite bosse là parce que t'es tombé un jour mais que t'es jamais allé à l'hôpital. Parce que t'es bête. T'es bête putain. Tu m'énerves, tu me saoule. Tu me rends folle, tu me rends malade. Tu me fais du mal. Tu me manques. S'il te plait, reviens.


Allez, s'il te plait, reviens. Je suis quoi moi, sans toi ? Une fille qui ère, qui se perd. Voilà, c'est ça, je suis perdue, je me suis perdue. Je me sens mal, j'ai plus de but. En partant, t'as dû prendre deux trois trucs à moi. Deux trois trucs dont j'ai besoin pour avancer sans toi. Tu veux pas me les rendre ? Je t'ai rien fait moi. J'ai rien fait pour mériter ça. T'es arrivé comme ça, sans crier garde. Je cherchais rien, je te cherchais pas. Puis t'es passé, un petit moment. T'es resté, un tout petit peu. Et t'as disparu. Tu m'as laissé tombé comme si j'étais rien. Comme si j'étais une erreur. En fait, tu t'es intéressé à moi juste assez pour me casser ? C'est ça que tu voulais ? Tu sais, j'ai jamais rien voulu de tout ça moi. Je voulais grandir, vite, trop vite. Je voulais juste savoir qui t'étais. Pourquoi t'étais toi. Et pourquoi je serais plus jamais moi.